Tremblements de terre en Belgique

Qu'est-ce qu'une séquence (un essaim) de tremblements de terre ?

Il s'agit d'une série de séismes, généralement de faible magnitude, dont les épicentres sont localisés dans une petite région et qui se produisent durant un laps de temps relativement court. Contrairement aux répliques qui suivent un tremblement de terre plus important et où la magnitude et le nombre des répliques vont clairement en décroissant dans le temps, lors de telles séquences de tremblements de terre, il n'y a pas de schéma clair dans l'évolution des magnitudes. On n'y décèle en général ni choc principal, ni précurseur, ni réplique. Sans être fréquentes dans nos régions, les séquences de tremblements de terre n'y sont pas non plus un phénomène rare. Ces trente dernières années, plusieurs séquences de tremblements de terre ont eu lieu en Belgique et dans les régions limitrophes:

• Dans la région de Dour (Hainaut): février / mai 1987: 58 tremblements de terre enregistrés, magnitude maximale: 2.6;
• Dans la région de Charleroi: septembre / novembre 1987: 24 tremblements de terre enregistrés, magnitude maximale: 2.4;
• Dans les Hautes Fagnes: octobre 1989 / mars 1990: 105 tremblements de terre enregistrés, magnitude maximale: 2.3;
• Dans la région de Voerendaal et Kunrade (Limbourg néerlandais): décembre 2000 / août 2001: plus de 150 tremblements de terre enregistrés, magnitude maximale: 3.5 (source: KNMI)

De ces données, il ressort que les séquences de tremblements de terre dans nos régions durent en général de trois à six mois et qu'elles se composent de quelques dizaines à plus de cent séismes dont la magnitude ML dépasse rarement 3.5 (échelle de Richter).

Évolution de la séquence de tremblements de terre dans le Brabant wallon

La figure ci-dessous montre l'évolution de la séquence de tremblement de terre de Court-Saint-Étienne - Ottignies. Les trois graphiques du haut montrent le nombre journalier de tremblements de terre répartis en trois classes de magnitudes différentes: de haut en bas: magnitudes supérieures à 3.0 , entre 2.0 et 3.0 et plus petites que 2.0. Le graphique inférieur montre l'évolution du moment sismique cumulé: cette grandeur est une mesure de la quantité d'énergie totale dégagée par un séisme.

La séquence a commencé le 12 juillet 2008 avec un séisme de magnitude 2.2, suivi, le lendemain, 13 juillet, du séisme le plus important à ce jour, de magnitude 3.2. Durant les trois semaines suivantes, on recense une vingtaine de tremblements de terre, tous d'une magnitude inférieure à 2.0. Cette série semble s'inscrire dans le schéma: précurseur, choc principal, répliques. Les 8, 9 et 10 août, on note un regain d'activité avec 15 séismes, dont 2 de magnitude supérieure à 2.0. On remarque sur le graphique inférieur que le séisme du 13 juillet est responsable à lui seul de plus de la moitié de l'énergie totale dégagée et qu'ensuite, la plus grande partie de l'énergie sismique a été dégagée lors des deux pics d'activités des 8 / 10 août et 12 / 13 septembre.

Mesures réalisées par le réseau sismique belge

Mesures réalisées par le réseau sismique allemand de Bensberg (Université de Cologne)

Tectonique

La Belgique et le reste de l'Europe du Nord-ouest sont situés en zone qualifiée d’intraplaque, loin des frontières actives des plaques tectoniques, là où se produisent la plupart des tremblements de terre. On rencontre cependant aussi chez nous des failles actives, avec les séismes qui s'y rapportent. Ces derniers sont cependant moins fréquents et moins forts qu'aux limites des plaques.

En Belgique et dans les régions voisines, on distingue, sur base de la géologie et de la séismicité, différentes zones dites séismotectoniques. La zone séismotectonique dans laquelle la séquence de tremblements de terre du Brabant wallon se produit est le massif anglo-brabançon. C'est un bloc tectonique qui date du Calédonien (-540 à -425 Ma) et qui s'étend sur les provinces du Brabant, d'Anvers, et des Flandres orientale et occidentale. Il est limité au sud par la faille Bordière, une faille décrochante ancienne. La limite nord se trouve aux Pays-Bas, au nord de la province de Zélande. Le massif anglo-brabançon s'étend à l'ouest sous la Mer du Nord méridionale et rejoint, en Angleterre, le bassin d'Anglia.

Le massif anglo-brabançon se caractérise par une séismicité plutôt modérée. Les séismes n'y sont pas fréquents mais peuvent être cependant assez forts. L'exemple le plus connu est celui du tremblement de terre du 11 juin 1938 dont l'épicentre était situé entre Ronse (Renaix) et Oudenaarde (Audenarde). Sa magnitude ML était de 5.6 (M=5.0) et c'est le séisme le puissant qui a eu lieu sur le territoire belge depuis le commencement des enregistrements sismiques au début du XXème siècle. Il a causé des dégâts assez importants dans le sud de la Flandre orientale et dans le nord du Hainaut, ainsi que dans les villes de Kortrijk (Courtrai) et de Gent (Gand). Parmi les séismes relevant du massif anglo-brabançon, on compte également le tremblement de terre qui s’est produit en 1995 au Roeulx et de magnitude ML 4.5. La séismicité semble également se prolonger sous la mer du Nord, même au-delà de la côte belge, où plusieurs séismes de magnitude avoisinant 3.0 ont été enregistrés. Le plus grand tremblement de terre dans le massif anglo-brabançon, connu par les sources historiques est celui de 1382 en Mer du Nord. Sa magnitude est estimée à M=6.0. Un autre tremblement de terre historique important s'est produit à proximité de la séquence actuelle dans le Brabant wallon; c'est celui du 23 février 1828, dont l’épicentre était situé à la limite entre la Hesbaye brabançonne et liégeoise (voir ci-dessous). Sa magnitude est estimée à M=5.0.

Mécanisme au foyer

Les tremblements de terre du massif anglo-brabançon, en ce compris la séquence de tremblements de terre du Brabant wallon, révèlent la présence de failles actives dans cette région. Les indices géologiques en ce sens sont cependant plutôt maigres. La cartographie des failles est particulièrement difficile dans cette zone de structures complexes très anciennes et où les affleurements rocheux et points d'observations sont rares. Sur les anciennes cartes géologiques du massif du Brabant, on note un certain nombre de failles orientées nord-est/sud-ouest, mais il n'y a pas d'unanimité à cet égard. La direction de mouvement et l'inclinaison de ces failles ne sont pas davantage connues. L'interprétation de données aéromagnétiques a permis de proposer d'autres structures de failles. Et à ce jour, on ne peut distinguer clairement, parmi ces failles, celles qui sont actives.

Quant aux séismes eux-mêmes, ils n'apportent pour le moment pas de réponse définitive sur la géométrie et le mouvement des failles de Court-Saint-Étienne et d'Ottignies. Le mécanisme au foyer des tremblements de terre du 13 juillet montre soit un décrochement dextre le long d'une faille orientée est-nord-est/ouest-sud-ouest, soit un décrochement senestre le long d'une faille orientée nord-nord-ouest/sud-sud-est. Les épicentres de la séquence montrent un léger alignement dans la première direction. Il faut cependant préciser que les incertitudes sur la localisation et la profondeur sont encore trop élevées. Des mesures complémentaires par des stations sismiques temporaires qui ont été installées dans la région devraient permettre d'améliorer la localisation et, espérons-le, d'arriver à une meilleure détermination de la localisation des différents événements sismiques et donc des paramètres de la zone de faille responsable de cette activité.

	Azimut	Pendage	Glissement	Représentation
Plan 1	66°	64°	-176°
Plan 2	334°	68°	-26°

Tremblements de terre précédents dans la région

Entre le 6 janvier 1953 et le 11 février 1957, la région de Court-Saint-Etienne a été secouée par une série de tremblements de terre, de manière assez semblable à celle que nous connaissons actuellement. Seuls les séismes les plus importants ont été enregistrés par la station sismique d’Uccle parce que les équipements de l’époque ne permettait pas d’enregistrer les séismes de magnitude inférieure à 3.0.

Les tremblements de terre les plus importants, pour lesquels une enquête officielle a été réalisée à l’époque par l’Observatoire Royal de Belgique sont les suivants:

Le premier événement sismique a été le plus important. Nous reproduisons ci-dessous la carte macrosismique établie à partir d’une réévaluation actuelle des documents archivés à l’Observatoire Royal de Belgique.

La description des effets produits par ces différents événements indiquent qu’ils se sont produits plus au sud que ceux de la séquence actuelle.

Le tremblement de terre le plus important dans cette partie du massif géologique du Brabant s’est produit le 23 février 1828 à la limite entre la Hesbaye brabançonne et liégeoise. Ce tremblement de terre, dont la magnitude est évaluée à M=5.0, a provoqué des destructions aux habitations et monuments patrimoniaux dans toute cette partie de notre pays. Remarquons que cet événement important pour nos régions n’avait été précédé d’aucun séisme précurseur.